Page:Huysmans - A Rebours, Crès, 1922.djvu/69

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parti pris, sans haine, il décrivait la vie journalière de Rome, racontait dans les alertes petits chapitres du Satyricon, les mœurs de son époque.

Notant à mesure les faits, les constatant dans une forme définitive, il déroulait la menue existence du peuple, ses épisodes, ses bestialités, ses ruts.

Ici, c’est l’inspecteur des garnis qui vient demander le nom des voyageurs récemment entrés ; là, ce sont des lupanars où des gens rôdent autour de femmes nues, debout entre des écriteaux, tandis que, par les portes mal fermées des chambres, l’on entrevoit les ébats des couples ; là, encore, au travers des villas d’un luxe insolent, d’une démence de richesses et de faste, comme au travers des pauvres auberges qui se succèdent dans le livre, avec leurs lits de sangle défaits, pleins de punaises, la société du temps s’agite : impurs filous, tels qu’Ascylte et qu’Eumolpe, à la recherche d’une bonne aubaine ; vieux incubes aux robes retroussées, aux joues plâtrées de blanc de plomb et de rouge acacia ; gitons de seize ans, dodus et frisés ; femmes en proie aux attaques de l’hystérie ; coureurs d’héritages offrant leurs garçons et leurs filles aux débauches des testateurs ; tous courent le long des pages, discutent dans les rues, s’attouchent dans les bains, se rouent de coups ainsi que dans une pantomime.

Et cela raconté dans un style d’une verdeur étrange, d’une couleur précise, dans un style puisant à tous les dialectes, empruntant des expressions à toutes les