Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/170

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laques jusqu’aux flambes du capucine, jusqu’aux splendeurs glorieuses des saturnes et des cinabres, tout le faste, tout le rutilement, tout l’éclat des jaunes, depuis les chromes pâlis jusqu’aux gommes-guttes, aux jaunes de mars, aux ocres d’or, aux cadmium, s’avancèrent, chairs purpurines et débordées, crinières rousses et sablées de poudre d’or, lèvres voraces, yeux en braises, soufflant des haleines furieuses de patchouli et d’ambre, de musc et d’opopanax, des haleines terrifiantes, des lourdeurs de serres chaudes, des allégro, des cris, des autodafés, des fournaises de rouge et de jaune, des incendies de couleurs et de parfums.

Puis tout s’effaça, et alors les couleurs primordiales : le jaune, le rouge, le bleu, les parfums pères des odeurs composées : le musc-tonkin, la tubéreuse, l’ambre, parurent et s’unirent devant moi en un long baiser.

À mesure que les lèvres se touchaient, les tons faiblissaient, les senteurs se mouraient ; comme les phénix qui renaissent de leurs cendres, ils allaient revivre sous une autre forme, sous la forme des teintes dérivées, des parfums originaires.

Au rouge et au jaune succéda l’orange ; au jaune et au bleu, le vert ; au rose et au bleu, le violet ; les non-couleurs même, le noir et le blanc parurent à leur tour et de leurs bras enlacés tomba lourdement la couleur grise, une grosse pataude qu’un