Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/257

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goulues de M. Lambois et une étincelle dans l'œil en étain du vieux notaire ; ils avaient bien dîné, bu d’un ancien vin de Riceys, un peu dépouillé, couleur de violette ; dans la tiédeur de la pièce close, leurs crânes s’empourpraient aux places demeurées vides, leurs lèvres se mouillaient, excitées par cette entrée de la femme qui apparaissait maintenant qu’ils pouvaient se désangler, sans témoins, à l’aise. Peu à peu, ils se lancèrent, se répétant pour la vingtième fois leur goût, en fait de femmes.

Elles ne valaient aux sens de Maître Le Ponsart que boulottes et courtes et très richement mises. M. Lambois les préférait grandes, un peu maigres, sans atours rares ; il était avant tout pour la distinction.

— Eh ! la distinction n’a rien à voir là-dedans, le chic parisien, oui, disait le notaire dont l'œil s’allumait de flammèches ; ce qui importe, avant tout, c’est de ne pas avoir au lit une planche.

Et il allait probablement exposer ses théories sensuelles quand un coucou sonnant bruyamment l’heure, au-dessus de la porte, l’arrêta net. Diable ! fit-il, dix heures ! il est temps que je regagne mes pénates si je veux être levé assez tôt demain pour prendre le premier train. Il endossa son paletot ; l’atmosphère plus fraîche de l’antichambre refroidit l’ardeur de leurs souvenirs. Les deux hommes se serrèrent la main, soucieux, sentant, maintenant