Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/303

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du Dragon, près de la Croix-Rouge, deux potages et deux parts de gigot, pour trois. — Je vais moudre le café, tandis que vous achèterez des provisions, conclut Madame Champagne, et pendant ce temps Sophie mettra le couvert.

Vingt minutes après, elles étaient installées dans l’arrière-boutique, exclusivement meublée d’une table ronde, d’une fontaine, d’un petit fourneau et de trois chaises.

Sophie ne pouvait avaler ; les morceaux lui bouchaient la gorge.

— Allons, ma belle, disait Madame Dauriatte, qui mangeait ainsi qu’un ogre, il faut vous forcer un peu.

Mais la jeune fille secouait la tête, donnant à Titi, le petit chien-loup de la papetière, la viande qui se figeait dans son assiette.

Et comme Madame Dauriatte insistait.

— Laissez-la, le chagrin nourrit, attesta judicieusement Madame Champagne qui n’ayant, elle aussi, ce soir-là, aucun appétit, s’alimentait du moins avec des verres d’un liquide rouge.

Madame Dauriatte opina du bonnet, mais ne souffla mot, car elle avait des joues telles que des balles ; et des rigoles de jus serpentaient jusqu’à son menton, tant elle se hâtait à torcher les plats.

— Voyons maintenant, fit la papetière qui éteignit sa lampe à esprit de bois et versa l’eau chaude sur le café, —