Page:Huysmans - Croquis parisiens.djvu/309

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sous par jour, espérant encore que le père de son amant lui viendrait en aide. Puis, à bout de ressources, elle lui avait écrit une lettre, vivant, l’oreille au guet, dans l’espoir d’une réponse qui n’arriva pas et à laquelle suppléa la visite du terrible vieillard qui la chassait.

Enfin, la chance lui souriait tout de même maintenant un peu ; Madame Champagne qu’elle avait connue en achetant des journaux et de l’encre et en se livrant chez elle à une causette quotidienne, le matin, lorsqu’elle se rendait au marché, consentait à la secourir. Outre qu’elle avait une langue alerte et bien pendue et une grande habitude du monde, songeait Sophie, c’était une femme établie, une commerçante qui avait été réellement mariée. Ce n’était plus une pauvre fille comme elle-même, qu’on pouvait rabrouer parce qu’elle était sans situation honorable, sans défense, que le notaire allait avoir à combattre ; sautant d’un extrême à l’autre, du morne accablement au vif espoir, Sophie était certaine que sa misère était sur le point de prendre fin, et Madame Dauriatte, par platitude, exprima tout haut ce que la jeune fille pensait tout bas.

— Votre affaire est dans le sac, ma petite, parce que, voyez-vous, entre gens qui ont des positions convenables, on s’entend toujours ; elle ajouta qu’on s’était sans doute exagéré les menaces de ce notaire qui, en raison même de ses richesses qu’elle