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LE MARCHAND DE MARRONS


Les pavés tressaillent déchaussés par le roulis des fardiers et des haquets ; les chiens détalent à toutes pattes, les hommes hâtent le pas, assourdis et aveuglés par une furieuse bourrasque de pluie et de grêle. Les girouettes des maisons tournent et grincent affolées, les fenêtres mal closes gémissent à fendre l’âme, les gonds oxydés des portes crient affreusement tandis que seul au coin de la rue, dans une niche contiguë ; au comptoir d’un marchand de vins, le débitant de marrons demeure impassible, hurlant aux passants transis : eh ! chauds, chauds, les marrons !

Que d’événements frivoles ou graves, cet homme est à même de voir, alors que le ventre au feu et la face au vent, il fait grêler dans sa poêle à jour, les marrons aux coques d’or ou qu’il remue les châtaignes qui mijotent sous le torchon de toile