Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/157

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La répugnance qui le prit accéléra encore sa hâte de posséder quelque chose de féminin qui simulât un plaisir, une grâce. Ces pîtresses de foire jouaient pas trop mal leur rôle. Elles ne le déridaient plus, maintenant que devenu moins fringant et moins jeune, il perdait plus difficilement la tête au moment convenu.

Sa femme si froide lui semblait passionnée à côté de ces histrionnes, mais ici et plus vivement encore le souvenir de son ancienne maîtresse, ses frémissements, ses pâmoisons, lorsqu’il la dodelinait entre ses bras, le hantèrent. Ah ! le sang lui dansait pour de bon dans les veines à celle-là et le cours de ces extases n’était pas réglé d’avance !

Ne pouvant savoir si elle était vivante ou morte, il aspirait après une fille semblable, après une nouvelle maîtresse, puis il s’avouait qu’il n’était plus d’âge à séduire une femme.

La pensée d’aller échanger de discrets signaux au travers des vitres d’une boutique de modiste ou de cordonnière, de se laisser rabrouer à la porte, de perdre son temps à de tels essais, la crainte d’être ridicule, l’arrêtaient. D’ailleurs, il n’avait que peu d’illusion sur ses charmes. Il savait ne pas avoir ce je ne sais quoi qui fait qu’un homme même infirme et laid enjôle immédiatement une femme. Il connaissait assez la vie pour ne pas ignorer que l’intelligence, que la distinction ne sont que de maigres atouts auprès des filles qui se toquent du plus affreux goujat parce qu’il a l’œil polisson ou féroce, qui s’en énamourent