Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/160

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ce lignard ne possédait pas une payse, une fille quelconque qui lui laçait les bras autour du corps, lui versait, la régalade de gros baisers sur le cou, ou lui effilait par amitié la moustache, sur un lit de sangle ou dans le coin d’une cuisine ? Il devait être bien heureux celui-là. On l’attendait au moins quand il était libre ! – puis André haussait les épaules, s’avouait stupide, car enfin, mieux valait crever que de mener la déplorable vie de ce pauvre diable !…

Ces soirs-là, il finissait par se traîner jusque chez lui, avec cette sorte d’hébétude des gens qui, après avoir pleuré pendant des heures, s’engourdissent dans une torpeur presque douce.

Une fois couché, par exemple, sa blessure le travaillait encore. Il repartait de plus belle, dans ses rêves navrés. Il enviait, en dernier ressort, ceux qui, gorgés d’une femme, ne savent comment se soustraire à ses caresses. Jamais femme ne l’avait poursuivi, il en était à connaître encore le supplice de ce qu’on nomme vulgairement un crampon. Toujours, il avait été lâché, le premier, jamais il n’avait su s’attacher une maîtresse.

Après s’être applaudi de n’avoir jamais connu de tels embarras, après avoir même blagué des camarades qui étaient relancés par leurs amoureuses, maintenant, il les jalousait.

Dans ses moments de lucidité, il cherchait un remède qui jugulât la maladie dont il souffrait. Le seul qu’il imaginait, séduire une fillette presque sage lui paraissait impossible, il était forcément obligé d’a-