Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/166

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qui vous déterminent, André dissimula le plaisir que lui causait cette offre et répondit, du ton le plus indifférent qu’il pût prendre que peu lui importait d’aller dans un endroit plutôt que dans un autre. Cyprien s’efforça si bien de l’allécher par les éloges qu’il débitait sur ces quartiers de fête, qu’agacé, André voulut le contredire par un débinage systématique des promenades qu’il vantait. Il éprouvait alors cet étrange besoin qui vous porte à juger mauvais et à dénigrer quand même ce qui vous a été loué, sans mesure, d’avance.

Une fois sortis, ils s’acheminèrent, marchant à petites enjambées, musardant, le nez en l’air, par les rues. lis causaient maintenant sur toutes choses, sans suite. Une boutique de pharmacie qui farda de vert et de rose le visage de Cyprien passant dans le rayon des bocaux frappés de feux, ramena les pensées d’André sur le prospectus du peintre.

— Tu es donc bien dans la panne, dit-il, que tu te livres à des travaux de cette espèce ?

Cyprien poussa un soupir. – Ne m’en parle pas, murmura-t-il, une panne absolue, terrible. Rien ne va plus comme disent les croupiers des maisons de jeux, – c’est tout juste si mon œuvre pourrait se vendre sous une porte, avec les six couteaux couchés dans une boîte, les petites cuillers en ruolz, les chandeliers et les panoplies en réduction spécialement fabriqués ou volés par les camelots – enfin, c’est comme cela. – Et, sautant d’un sujet à un au-