Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/231

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sur sa cigarette. – Mélanie tourna et vira dans la cuisine, ouvrit et ferma des portes, puis elle apparut, tenant un journal et des lettres, se plaignant de la bise, sortant des phrases toutes faites, emmagasinées depuis des ans dans sa cervelle et mécaniquement ramenées, à chaque fin d’automne, aux approches du froid.

André déchira la bande de son journal et, pendant que la bonne quittait la pièce, il se recueillit encore, se demandant comment il allait s’y prendre.

Il enfila, toujours très indécis, sa culotte, passa dans son cabinet de toilette, poussa la porte de communication, entra dans la cuisine et pria Mélanie de lui verser un peu d’eau tiède dans son verre à dents.

Tandis qu’elle penchait sa bouillotte dont le couvercle mal assujetti sur ses charnières claquait audessus du mince filet d’eau chantant dans la rigole, il lui dit :

— Ah ! à propos, Mélanie, c’est aujourd’hui jour de marché, je crois. – Tâchez donc d’acheter pour pas trop cher, un fin morceau. – J’aurai du monde à déjeuner demain.

— Bien, Monsieur ; Monsieur voudrait du faux-filet ou du rosbif ?

— Non, je voudrais quelque chose de plus délicat et de plus léger, c’est pour une femme ; – et il ajouta, en la regardant dans les yeux, – qui couchera ici, ce soir.

Mélanie ne poussa même pas une exclamation ; elle