Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/257

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trez-moi votre bobine ! – Une moucharde pucelle et vieille disant à celles qui ont découché : – Tiens, une telle, tu as un col sale et c’est jeudi ; tu n’es donc pas rentrée, hier, chez toi ? Du reste, vrai, tu peux te regarder, tu en as des yeux ! – ou bien jetant des aspostrophes de ce genre à celles dont le ventre bombe : – Ah ! la petite qui s’est étalée sur une pierre pointue ! ou encore : – dites donc, la belle, vous avez sans doute mangé des haricots pas cuits, c’est cela qui vous a fait gonfler ?

— Ça t’amuse, reprit Jeanne, avec un peu de mélancolie, regardant André qui souriait, béatement, dans son fauteuil. – Eh bien ! si l’hiver, tu étais enfermé dans des pièces pareilles, pleines de courants d’air, chauffées au coke, éclairées dès deux heures de l’après-midi, par des becs de gaz, pendus si bas, qu’ils vous brûlent et vous font tomber les cheveux, si tu étouffais, l’été, au milieu de tout un monde qui se déshabille pour se mettre à l’aise, tire les nénés de son corsage et les soupèse afin de voir qui les a les plus gros et les plus fermes, si tu avais à supporter aussi trois ou quatre mois de morte saison, tu verrais qu’il n’y a vraiment pas de quoi rire. – Non, il n’y a pas de quoi rire, reprit-elle, d’un ton convaincu, après un silence.

André s’excusa de son air radieux et il le justifia par le spectacle qu’elle avait montré.

— C’est égal, je voudrais voir ça, fit-il, réjoui par cette perspective de corsages laissant passer à la file, dans un cadre fripé de linge, de blanches poires aux queues