Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/267

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mains, se garant des lèvres, ne fermentant pas.

— Tiens, tu es encore la meilleure de toutes, dit-il subitement.

Mais Jeanne bouda, lui reprochant de songer à ses anciennes maîtresses.

Il la cajola, étonné lui-même de la phrase qu’il avait prononcée tout haut et il se soumit pour la contenter à une opération qu’il retardait depuis des mois. Jeanne le priait instamment de se laisser enlever deux vers qui s’étaient logés, parait-il, sous la peau du front.

Alors elle les serra entre ses ongles acérés de telle sorte qu’il se prit à hurler, mais elle le menaça d’employer une pointe d’aiguille s’il ne se taisait point, puis elle le baisa tendrement.

— Tu es plus beau maintenant, dit-elle, tiens, regarde-toi.

Et il dut se lever pour se mirer dans une glace. Il ne se jugea ni plus mal, ni mieux ; il déclara cependant que sa tête s’était heureusement modifiée depuis l’extraction des matières sébacées qu’elle avait subie.

Et des soirées continuèrent, pareilles à celle-là, faisant peu à peu sortir tout l’enfantillage contenu dans la femme et dans l’homme. Après le dîner, on buvait une larme de bénédictine ou de prunelle, parfois même André allait chercher des marrons et du macadam et, tout en grignotant et en buvant, ils échangeaient ces banales effusions, ces commodes courtoisies nécessaires à l’entretien de l’affection et au repos de l’intelligence.