Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/313

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Tout au plus, la tiédeur du ciel avait-elle fait grouiller en plus grand nombre que l’année dernière, au moment avancé de la saison où André avait emménagé, les palefreniers et les laquais échappés de tous les hôtels du voisinage. Il y en avait, tassés comme des mouches dans un coin, pipant et salivant, conférant avec le portier d’une maison en train d’aiguiser au tripoli les lueurs des boutons de portes ; et d’autres arrivaient, dandinant leurs fesses à l’étroit dans ces culottes qui forment la poche aux genoux, et qui bouffent et tirebouchonnent sur des galoches, rejoints bientôt par des garçons d’écurie en veste de travail, les manches retroussées la chemise de flanelle rétrécie au cou par des lavages, les faces soigneusement plaquées sur les tempes, la toque à deux rubans écrasée sur la nuque. Et tous gesticulaient, ouvrant la mâchoire, se secouant les poings. De sa fenêtre, André suivait le mouvement de leurs bouches rasées, devinait des invites à boire aussitôt acceptées, des cancans répercutés des offices aux remises, des bonjours lancés à des chiens de sellier assis sur leurs nèfles, dressant leurs oreilles affûtées en sifflets, secouant leurs poils gris, hérissés sur le collier écarlate à clous de cuivre.

Cet épanouissement de valetaille et de chiens au soleil le réjouissait.

Il perdait des heures à examiner le défilé de ces gens dans sa rue, la procession des messieurs et des dames s’engouffrant sous le porche du ministère. Tout à coup, son regard qui s’éparpillait se concen-