Page:Huysmans - En menage - ed Fasquelle 1922.djvu/42

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d’abat-jour verts, d’un poêle de fonte, d’un comptoir peint en faux acajou, à filets ombrés, garni d’un vase de verre bleu plein de fleurs, de mesures d’étain, posées en flûte de pan, d’un tronc en nickel, d’un chat bâillant et d’une écritoire. Derrière ce meuble des rayons s’étageaient, supportant des litres décachetées, une théière en porcelaine, des tasses blanches avec trois pieds et une anse écarlates, et des initiales salement dédorées au centre. Une glace encastrée au milieu des rayons reflétait le haut du bouquet, marinant dans le vase bleu, le tuyau zigzaguant du poêle, trois patères inoccupées, fichées au mur, la doublure éraillée d’un paletot, le luisant d’un chapeau gras. Sur une petite table, dans un coin, un fromage de Bourgogne, le ventre entaillé, s’effondrait sous l’attaque d’un millier de mouches ; près des casiers où se tassaient des serviettes munies de ronds, une huche contenait des pains grêles et mou qui touchaient presque à une cage accrochée au plafond. Cette cage était vide par suite d’un décès, et une seiche l’habitait, seule, pendue au bout d’un fil.

Cet établissement tenait de l’auberge de campagne et de la crèmerie du Paris pauvre. Le patron, en manches de chemise, l’estomac en avant comme une bosse, le nez en trompette, se gobergeait, la serviette au bras, traînant, dans une boue de crachat et de sable, des pantoufles tapissées de dominos et de jeux de cartes.

Des bruits de vaisselles et de chaudrons, des chants de fritures et des plaintes de toux s’échappaient de la porte toujours battante de la cuisine. Des grésil-