Page:Huysmans - En rade.djvu/101

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comme par une variole géante, criblé de marques rondes, aussi larges que ces bassins construits à Versailles sous le règne du Grand Roi ; par places, de fictifs ruisseaux zigzaguaient, striés par la réfraction d’on ne savait quoi, de fils du gris violacé des iodes ; par d’autres, d’inauthentiques canaux rejoignaient de faux étangs qui se teignaient du rouge malsain des bromes ; par d’autres encore, d’inguérissables plaies soulevaient de roses vésicules sur cette chair de minerai pâle.

Jacques consultait une carte qu’il conservait pliée dans la poche d’un vêtement de fabrication anglaise qu’il ne se rappelait pas avoir jusqu’ici porté. Cette carte, publiée à Gotha, par les soins de Justus Perthes, lui semblait d’une indiscutable clarté, avec ses masses pointillées, ses détails en relief, ses dénominations latines : « Lacus Mortis, Palus Putredinis, Oceanus Procellarum » empruntées à la vieille Mappa Selenographica de Beer et de Maedler, dont elle n’était, au demeurant, qu’une copie réduite.

— Voyons, se dit-il, nous avons le choix entre deux chemins. Ou descendre le détroit formé par les bords de la Mer de la Sérénité et le col du Mont Hæmus, ou remonter par le défilé du Caucase jusqu’à la lisière du Lac des Songes et redescendre, en suivant les montagnes du Taurus jusqu’au Jansen.