Page:Huysmans - En rade.djvu/68

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toilette garni de rayons ; une étrange odeur s’échappait de cette pièce, une odeur de poussière tiède, au fond de laquelle filtrait comme un parfum très effacé d’éther.

Ce relent l’attendrit presque, car il suscitait en lui les dorlotantes visions d’un passé défait ; il semblait la dernière émanation des senteurs oubliées du dix-huitième siècle, de ces senteurs à base de bergamote et de citron, qui, lorsqu’elles sont éventées, fleurent l’éther. L’âme des flacons autrefois débouchés revenait et souhaitait une plaintive bienvenue au visiteur de ces chambres mortes.

C’était probablement le cabinet de toilette de cette marquise de Saint-Phal dont le père Antoine, avait, lors de ses voyages à Paris, souvent parlé.

Et cette chambre à coucher était sans doute aussi la sienne. La tradition paysanne représentait la marquise effilée, mignarde, alanguie, presque dolente. Tous ces détails se rappelaient, les uns les autres, se groupaient, puis se fondaient en une image poudrée de jeune femme, rêvant dans une bergère, et se chauffant les pieds et le dos, entre les deux cheminées, aux âtres rouges.

Comme tout cela était loin ! les frileux appas de la femme dormaient dans le cimetière, à côté