Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/353

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un sourire ; et jamais je ne lui parlerai, jamais je ne le remercierai, jamais même je ne saurai qui il est — jamais je ne le reverrai peut-être !

En partant d’ici, je conserverai un ami pour lequel je sens, moi aussi, de l’affection ; et aucun de nous n’aura même échangé avec l’autre un geste !

Au fond, ruminait-il, cette réserve absolue ne rend-elle pas notre amitié plus parfaite ; elle s’estompe dans un éternel lointain, reste mystérieuse et inassouvie, plus sûre.

Tout en se ratiocinant ces réflexions, Durtal se dirigea vers la chapelle où l’appelait l’office et, de là, il se rendit au réfectoire.

Il fut surpris de ne trouver qu’un seul couvert sur la nappe. Qu’est-il arrivé à M. Bruno ? — voyons, je vais quand même un peu l’attendre, songea-t-il ; et, pour tuer le temps, il s’amusa à lire un tableau imprimé qui était pendu au mur.

C’était une sorte d’avertissement qui débutait ainsi :

Eternité !

« Hommes pécheurs, vous mourrez. — Soyez toujours prêts. »

« Veillez donc, priez sans cesse, n’oubliez jamais les quatre fins que vous voyez, ici, tracées : »

« La Mort qui est la porte de l’Eternité, »

« Le Jugement qui décide de l’Eternité, »

« L’Enfer qui est le séjour de la malheureuse Eternité, »

« Le Paradis qui est le séjour de la bienheureuse Eternité. »

Le P. Etienne interrompit Durtal, en lui annonçant