Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/409

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et à l’ambre. Cela sentait le mouchoir de luxe secoué dans une église où persistait un relent d’encens.

Mais l’homme même, l’évêque que fut saint François de Sales était suggestif ; il évoquait avec son nom toute l’histoire mystique du XVIIe siècle.

Et Durtal rappelait ses souvenirs gardés de la vie religieuse de ces temps. Il y avait eu alors dans l’Eglise deux courants :

Celui du Mysticisme dit exalté, originaire de sainte Térèse, de saint Jean de la croix et ce courant s’était concentré sur Marie Guyon.

Et un autre, celui du Mysticisme dit tempéré, dont les adeptes furent saint François de Sales et son amie, la célèbre baronne de Chantal.

Ce fut naturellement ce dernier courant qui triompha. Jésus se mettant à la portée des salons, descendant au niveau des femmes du monde, Jésus modéré, convenable, ne maniant l’âme de sa créature que juste assez pour la douer d’un attrait de plus, ce Jésus élégant fit fureur ; mais Mme  Guyon, qui dérivait surtout de sainte Térèse, qui enseignait la théorie mystique de l’amour et le commerce familier avec le ciel, souleva la réprobation de tout un clergé qui abominait la Mystique sans la comprendre ; elle exaspéra le terrible Bossuet qui l’accusa de l’hérésie à la mode, de molinisme et de quiétisme. Elle réfuta, sans trop de peine, ce grief, la malheureuse, mais il ne l’en persécuta pas moins ; il s’acharna sur elle, la fit incarcérer à Vincennes, se révéla tenace et hargneux, atroce.

Fénelon, qui avait essayé de concilier ces deux tendances, en apprêtant une petite Mystique, ni