Page:Huysmans - En route, Stock, 1896.djvu/411

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mal venue des vrais mystiques ; elle présumait et manquait, à coup sûr, de cette humilité qui a magnifié les sainte Térèse et les sainte Claire ; mais enfin, elle flambait, elle était une emballée de Jésus, elle n’était surtout pas une courtisane pieuse, une bigote mitigée de cour, comme la Maintenon !

Au reste, quelle époque religieuse que celle-là ! Ses saints ont tous quelque chose de sage et de compassé, de verbeux et de froid qui m’en détourne. Saint François de Sales, saint Vincent de Paul, sainte Chantal… non, j’aime mieux saint François d’Assise, saint Bernard, sainte Angèle… La Mystique du XVIIe siècle, elle est bien à l’avenant de ses églises emphatiques et mesquines, de sa peinture pompeuse et glacée, de sa poésie solennelle, de sa prose morne !

Voyons, fit-il, ma cellule n’est encore ni balayée, ni rangée et j’ai peur, en m’attardant ici, de gêner le P. Etienne. Il pleut cependant trop fort pour que je puisse me promener dans les bois ; le plus simple serait d’aller lire le Petit Office de la Vierge, à la chapelle.

Il y descendit ; elle était à cette heure à peu près vide ; les moines travaillaient dans les champs ou dans la fabrique ; seuls, deux pères, à genoux devant l’autel de Notre-Dame, priaient si violemment qu’ils ne l’entendirent même pas pousser la porte.

Et Durtal qui s’était installé auprès d’eux, en face du porche donnant sur le maître-autel, les voyait réverbérés dans la plaque de verre placée devant la châsse du Bienheureux Guerric. Cette plaque faisait, en effet, glace et les pères blancs s’y enfonçaient, vivaient en oraisons sous la table, dans le cœur même de l’autel.