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Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/312

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étaient bien obligés d’en convenir. En ce cloître du Val des Saints jadis si paisible, les soucis, jusqu’alors écartés de l’avenir, naissaient ; tous les pères envahissaient le scriptorium où étaient les revues et les journaux catholiques que recevait le monastère ; ils les lisaient silencieusement et, pendant la récréation, les commentaient, en les agrémentant parfois des plus cocasses gloses.

Tout ce petit monde qui n’était au courant de rien et qui s’était moqué, Dieu sait combien, jusqu’alors de la politique, se demandait quel mal il avait bien pu commettre pour qu’on le pourchassât de la sorte.

Et ce trouble se répercutait dans le noviciat.

Ce que vous avez fait, mais, aux yeux de vos proscripteurs, vous avez commis le plus impardonnable des crimes, celui de n’en pas commettre contre Dieu, dit Durtal, au petit frère Gèdre, qui le consultait, ahuri par ce bourdonnement de ruche qu’on enfume.

Tous erraient dans les corridors, aux écoutes. Le révérendissime était à Solesmes et l’on attendait avec impatience qu’il écrivît au père prieur pour savoir quand et comment s’effectuerait le départ.

Il n’y a pas de nouvelles, dit M. Lampre à Durtal qui sortait avec lui de la grand’messe, mais la résolution du chapitre des abbés est si parfaitement connue d’avance qu’une lettre de Dom Bernard ne nous apprendrait rien que nous ne sachions ; c’est l’exil à bref délai ; le lieu choisi du bannissement demeure seul ignoré et pour longtemps encore, je pense.

Et Durtal s’apprêtant à le quitter sur le seuil de l’église : — Voyons, reprit-il, puisque vous déjeunez aujourd’hui à la maison, au lieu de vous rendre chez moi à