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Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/344

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contenus dans des gaines d’étoffes rigides, tuyautées de longs plis, il apportait, en échange, des attitudes moins contraintes, des physionomies plus naturelles de gens redevenus, sur la terre, pesants ; il apportait un jeu de draperies plus malléables et de dessous plus souples ; il apportait surtout un don d’observation et une puissance à insuffler la vie qui font de lui l’un des plus grands artistes de tous les temps.

Il était certainement pieux puisqu’il a terminé ses jours dans un cloître et cependant son art ne décèle qu’une piété de superficie, qu’une piété de commande ; ses portraits sont ceux de gens qui se préoccupent plus de leurs propres affaires que de celles de Dieu ; ses prophètes sont des prophètes de marchés et de coin de feu ; son œuvre n’a pas été préparée par la prière et elle ne suggère pas l’idée de prier devant ; et c’est là, la tare de cette sculpture, si on l’envisage au point de vue où d’ailleurs, elle-même, se place ; car le tout est de s’entendre. Si Sluter ne nous avait pas présenté ses personnages comme étant des personnages de la bible, s’il les avait simplement étiquetés, sur un monument civil, sous le nom de négociants, de prêtres et d’échevins, il n’y aurait qu’à admirer et sans aucune restriction le talent immense de cet homme.

Le Calvaire qui était autrefois érigé sur le socle et dont il subsiste des débris était-il d’un sentiment plus religieux ? J’en doute, poursuivit Durtal ; j’ai vu au musée la tête retrouvée du Christ ; elle est correcte, d’un art déférent, d’une expression pathétique, d’une dévotion sonore, mais elle n’est pas supraterrestre, elle n’est pas divine et quant à la Vierge, dressée sur le portail de