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Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/458

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ce malheureux père Paton surtout, abandonné, loin des siens, sans existence monastique possible, dans ce trou.

Mais leur infortune n’allège pas la mienne ; elle ne fait, hélas ! Que l’aggraver et je tremble à l’idée de rentrer à Paris, dans la bagarre ; quelle tristesse !

Au lieu d’une propriété paisible, je vais retrouver les boîtes à dominos d’une maison commune, avec menace en dessus et en dessous, de femmes s’hystérisant sur des pianos et de mioches roulant avec fracas des chaises pendant l’après-midi et hurlant, sans qu’on se résolve à les étrangler, pendant la nuit ; l’été, ce sera la chambre de chauffe, l’étouffoir ; l’hiver, en place de mes belles flambées de pins, je considérerai par un guichet de mica du feu en prison qui pue. En fait d’horizons, j’aurai sans doute un paysage de cheminées. Bah ! Je m’étais jadis habitué aux futaies des tuyaux de tôle poussées dans le zinc des toits sur le fond saumâtre des temps gris. Je m’y raccoutumerai ; c’est un courant à reprendre.

Et puis… et puis on a bien des choses à expier. Si la schlague divine s’apprête, tendons le dos ; montrons au moins un peu de bonne volonté. On ne peut pourtant pas toujours être dans la vie spirituelle ce qu’est, dans la vie matérielle, le mari de la blanchisseuse ou de la sage-femme, le monsieur qui regarde, en se tournant les pouces !

Ah ! mon cher Seigneur, donnez-nous la grâce de ne pas nous marchander ainsi, de nous omettre une fois pour toutes, de vivre enfin, n’importe où, pourvu que ce soit loin de nous-mêmes et près de Vous !