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Page:Huysmans - L'Oblat.djvu/75

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tel qu’un ver, dans leurs racines, mais les horticulteurs d’ici sont habiles et le père de Fonneuve et Dom Felletin ont de vieux secrets de métier pour les guérir !

Mon dieu, que je suis bête ! s’écria-t-il, tout à coup, en s’arrêtant sur place. J’ai oublié la commission dont la mère Bavoil m’avait chargé ; il faut que je retourne au monastère.

Il revint sur ses pas et échangea un bonjour dans la porterie avec le frère Arsène, un convers qui cumulait les fonctions de tailleur et de concierge de l’abbaye.

— Est-ce que le père pharmacien est-là ?

— Bien sûr, Monsieur Durtal ; quand il n’y a pas office, il cuisine ses herbes dans sa chambre ; il n’en bouge pas.

Afin de permettre aux paysannes d’entrer à la pharmacie qui exécutait, pour la gloire de Dieu, leurs ordonnances, la cellule du père Philigone Miné était située près de la porterie, hors de la clôture.

Durtal tourna le loquet, mais malgré l’assurance du frère Arsène, la pièce était vide.

Pensant que le moine n’était pas loin, Durtal s’assit sur une chaise de paille et s’amusa à inventorier ce taudis.

C’était bien le capharnaüm le plus bizarre que l’on pût rêver ; ce réduit, badigeonné au lait de chaux, était une ancienne cuisine munie encore de son fourneau sur lequel mijotaient, en des casseroles de cuivre, d’inquiétants bouillons. Sur toute une partie des cloisons, des rayons de bois blanc contenaient des paquets étiquetés et des fioles ; en face de la fenêtre dont les blessures des vitres étaient pansées avec des étoiles de papier, une courtine de cretonne grasse ainsi qu’un