Aller au contenu

Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/169

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

noir, coiffée, de même qu’au Moyen Âge, d’une cornette, l’attendait auprès d’une chandelle, afin de verrouiller, dès sa rentrée, la porte.

Tout cela, se disait Durtal, c’est le squelette d’un donjon mort ; il conviendrait pour le ranimer de reconstituer maintenant les opulentes chairs qui se tendirent sur ces os de grès.

Les documents sont précis ; cette carcasse de pierre était magnifiquement vêtue et, afin de remettre Gilles en son milieu, il fallait rappeler toute la somptuosité de l’ameublement au xve siècle.

Il fallait revêtir ces murs de lambris en bois d’Irlande ou de ces tapisseries de haute lice, d’or et de fil d’Arras, si recherchées à cette époque. Il fallait paver l’encre dure du sol de briques vertes et jaunes ou de blanches et noires dalles ; il fallait peindre la voûte, l’étoiler d’or ou la semer d’arbalètes, sur champ d’azur, y faire éclater l’écu d’or à la croix de sable, du Maréchal !

Et les meubles se disposaient d’eux-mêmes dans les pièces où Gilles et ses amis couchaient ; çà et là, des sièges seigneuriaux à dosserets, des escabelles et des chaires ; contre les cloisons, des dressoirs en bois sculpté, représentant, en bas-relief, sur leurs panneaux, l’Annonciation et l’Adoration des Mages, abritant sous le dais de leur dentelle brune, les statues peintes et dorées de sainte Anne, de sainte Marguerite, de sainte Catherine si souvent