Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/266

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drait pour ne pas se vautrer, le moment venu, d’une façon ignoble. Cette question qui l’avait tant préoccupé, l’avant-veille, le laissait encore gêné mais inerte. Il ne cherchait plus à la résoudre, s’en remettait au hasard, se disait qu’il était bien inutile de dresser des plans, puisque presque toujours les stratégies les mieux combinées avortent.

Puis il se révolta contre lui-même, s’accusa de veulerie, marcha pour secouer cette torpeur qu’il attribuait aux effluves brûlants du feu. Ah çà, est-ce qu’à force d’avoir attendu, ses souhaits étaient taris ou las ? mais non, car il aspirait au moment où il pourrait pétrir cette femme ! Il cru trouver l’explication de son peu d’entrain, dans l’inévitable souci d’une première empreinte. Ce ne sera vraiment exquis, ce soir, qu’après celle-là, se dit-il ; le côté grotesque ne sera plus ; la connaissance charnelle sera faite ; je pourrai reprendre Hyacinthe, sans avoir la sollicitude inavouée de ses formes, l’inquiétude de ma tenue, l’embarras de mes gestes. Je voudrais bien, finit-il par se dire, en être à cet instant-là !

Le chat, assis sur la table, dressa tout à coup les oreilles, fixa de ses yeux noirs la porte et déguerpit ; la sonnette tinta ; Durtal s’en fut ouvrir.

Son costume lui plut ; elle portait, sous les fourrures qu’il enleva, une robe prune si foncée qu’elle