Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/408

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en déshérence ; un ingénieur nommé Pierre Jean a récemment parcouru à cheval les provinces du Midi, en annonçant qu’il était le Saint-Esprit ; à Paris, Bérard, un conducteur d’omnibus, de la ligne de Panthéon-Courcelles, atteste également qu’il corporise le Paraclet, tandis qu’un article de revue avère que l’espoir de la Rédemption fulgure en la personne du poète Jhouney ; enfin, en Amérique, de temps à autre, des femmes paraissent qui soutiennent qu’elles sont le Messie et qui recrutent des adhérents parmi les illuminés des revivals.

— Cela vaut, fit Carhaix, la théorie de ceux qui confondent Dieu et la création. Dieu est immanent dans ses créatures ; il est leur principe de vie suprême, la source du mouvement, la base de leur existence, dit Saint Paul ; mais il est distinct de leur vie, de leur mouvement, de leur âme. Il a son Moi personnel, il est Celui qui est, dit Moïse.

Le Saint-Esprit aussi, par le Christ en gloire, va être immanent dans les êtres. Il sera le principe qui les transforme et les régénère ; mais cela n’exige point qu’il s’incarne. Le Saint-Esprit procède du Père par le Fils ; il est envoyé pour agir mais il ne peut se matérialiser ; soutenir le contraire c’est de la folie pure ! c’est choir dans les schismes des Gnostiques et des Fratricelles, dans les erreurs de Duclin de Novare et de sa femme Marguerite,