Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/58

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après quoi, il sera temps qu’il meure. L’Église qui a déjà laissé introduire le gaz dans les chapelles, finira par remplacer les cloches par de puissants timbres. Alors, ce sera charmant ; ces mécaniques seront reliées par des fils électriques ; ce seront de vraies sonneries protestantes, des appels brefs, des ordres durs.

— Eh bien, ce sera le cas pour la femme de Carhaix de retourner dans le Finistère !

— Ils ne le pourraient, car ils sont très pauvres ; et puis Carhaix dépérirait s’il perdait ses cloches ! c’est tout de même curieux cette affection de l’homme pour l’objet qu’il anime ; c’est l’amour du mécanicien pour sa machine ; on finit par aimer, autant qu’un être vivant, la chose qui vous obéit et que l’on soigne. Il est vrai que la cloche est un ustensile à part. Elle est baptisée ainsi qu’une personne, et ointe du chrême du salut qui la consacre ; d’après la rubrique du Pontifical, elle est aussi sanctifiée, dans l’intérieur de son calice, par un Évêque, de sept onctions faites en forme de croix, avec l’huile des infirmes ; elle doit ainsi porter aux mourants la voix consolatrice qui les soutient dans leurs dernières affres.

Puis elle est le héraut de l’Église ; la voix du dehors comme le prêtre est la voix du dedans ; ce n’est donc pas un simple morceau de bronze, un mortier posé à la renverse et qu’on agite. Ajoute