Page:Huysmans - Là-Bas, Tresse & Stock, 1895.djvu/6

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c’est d’avoir incarné le matérialisme dans la littérature, d’avoir glorifié la démocratie de l’art !

Oui, tu diras ce que tu voudras, mon bon, mais, tout de même, quelle théorie de cerveau mal famé, quel miteux et étroit système ! Vouloir se confiner dans les buanderies de la chair, rejeter le suprasensible, dénier le rêve, ne pas même comprendre que la curiosité de l’art commence là où les sens cessent de servir !

Tu lèves les épaules, mais voyons, qu’a-t-il donc vu, ton naturalisme dans tous ces décourageants mystères qui nous entourent ? Rien. — Quand il s’est agi d’expliquer une passion quelconque, quand il a fallu sonder une plaie, déterger même le plus bénin des bobos de l’âme, il a tout mis sur le compte des appétits et des instincts. Rut et coup de folie, ce sont là ses seules diathèses. En somme, il n’a fouillé que des dessous de nombril et banalement divagué dès qu’il s’approchait des aines ; c’est un herniaire de sentiments, un bandagiste d’âme et voilà tout !

Puis, vois-tu, Durtal, il n’est pas qu’inexpert et obtus, il est fétide, car il a prôné cette vie moderne atroce, vanté l’américanisme nouveau des mœurs, abouti à l’éloge de la force brutale, à l’apothéose du coffre-fort. Par un prodige d’humilité, il a révéré le goût nauséeux des foules, et, par cela même, il a répudié le style, rejeté toute pensée