Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/10

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

point né sous l’aspect peccamineux de notre ressemblance et Elle n’aurait pu dès lors être la génitrice immaculée d’un Dieu. Notre malheur avait donc été la cause initiale de ses joies et c’était, à coup sûr, le plus déconcertant des mystères que ce Bien suprême issu de l’intempérance même du Mal, que ce lien touchant et surérogatoire néanmoins qui nous nouait à Elle, car sa gratitude pouvait paraître superflue puisque son inépuisable miséricorde suffisait pour l’attacher à jamais à nous.

Dès lors, par une humilité prodigieuse, Elle s’était mise à la portée des foules ; à différentes époques, Elle avait surgi dans les lieux les plus divers, tantôt sortant ainsi que de sous terre, tantôt rasant les gouffres, descendant sur des pics désolés de monts, traînant après elle des multitudes, opérant des cures ; puis, comme lasse de promener ces adorations, il semblait qu’Elle eût voulu les fixer à une seule place et Elle avait presque déserté ses anciens douaires, au profit de Lourdes.

Au XIXe siècle, cette ville avait été la seconde étape de son passage en France. Sa première visite avait été pour La Salette.

Il y avait des années de cela… Le 19 septembre de l’an 1846, la Vierge s’était montrée à deux enfants sur une montagne, un samedi, le jour qui lui était consacré et qui était, cette année, un jour de pénitence, à cause des Quatre-Temps. Par une nouvelle coïncidence, ce samedi précédait la fête de Notre-Dame des Sept-Douleurs, dont on commençait les premières vêpres, lorsque Marie émergea d’une coque de lumière au-dessus du sol.