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Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/170

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VII


Combien elle peut contenir de fidèles, la Cathédrale ? Près de 18000, répondit l’abbé Plomb. Mais il est inutile de vous assurer, n’est-ce-pas, qu’elle n’est jamais pleine ; que même pendant les temps de pèlerinages, les foules immenses du Moyen Age ne l’emplissent plus. Ah ! Chartres, n’est pas précisément ce qu’on appelle une ville pieuse.

— Elle est sinon hostile à la religion, au moins fort indifférente, fit l’abbé Gévresin.

— Le Chartrain est cupide, apathique et salace, répliqua l’abbé Plomb ; cupide surtout, car la passion du lucre est ici, sous des dehors inertes, féroce. Vraiment, par expérience, je plains le jeune prêtre que l’on envoie, pour ses débuts, évangéliser la Beauce.

Il arrive, plein d’illusions, rêvant aux conquêtes d’un apostolat, si désireux de se dévouer ! — et il s’affaisse dans le silence et le vide. Si encore on le persécutait, il se sentirait vivre ; mais on l’accueille par un sourire et non par une injure, ce qui est pis ; et promptement il se rend compte de l’inanité de ses démarches, du néant de ses efforts et il se décourage !