Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/275

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— J’ignorais cette propriété du lys, dit Durtal, en riant, mais je savais que ce même Albert le Grand assignait déjà cette qualité à la mauve ; seulement la patiente ne s’ingère pas le résidu de cette fleur, mais se tient simplement dessus ; et cela suffit — néanmoins pour que l’épreuve soit décisive, il sied que la mauve reste quand même sèche.

— Quelle folie ! s’exclama l’abbé Gévresin.

Complètement ahurie, la gouvernante regardait le sol.

— Ne l’écoutez pas, madame Bavoil, s’écria Durtal ; moi j’ai une autre idée moins pharmaceutique et plus religieuse, celle-ci : cultiver une flore liturgique et des légumineux à emblèmes, œuvrer un jardin et un potager qui célébreraient la gloire de Dieu, lui porteraient nos prières dans leur idiome, rempliraient, en un mot, le but du Cantique des trois jeunes hommes dans la fournaise lorsqu’ils invitent la nature, depuis le souffle des tempêtes jusqu’au dernier des germes enfouis dans les champs, à bénir le Seigneur !

— Pas mal, s’exclama l’abbé Plomb, mais il faudrait alors disposer de vastes espaces, car l’on n’énumère pas moins de cent trente plantes dans les Ecritures et immense est le nombre de celles auxquelles le Moyen Age décerna des sens !

— Sans compter, dit l’abbé Gévresin, qu’il serait équitable que ce jardin, dépendant de notre basilique, reproduisît la botanique de ses murs.

— La connaît-on ?

— L’on n’a point dressé pour elle comme pour la végétation lapidaire de Reims un catalogue ; car l’herbier minéral de la Notre-Dame de cette ville a été soigneusement