Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/380

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de l’aveugle né, de Tobie » ; mais malgré la placide énergie de ces fresques, l’on était quand même déçu par la lourdeur de l’ensemble, par l’aspect soporeux et désuet des tons. Il fallait arriver au chœur et franchir la barre de communion pour admirer des œuvres d’un concept très différent, surtout des portraits magnifiques de Saints de l’ordre des Frères-prêcheurs, étonnant par la force de prières, par la puissance de sainteté qui rayonnaient d’eux.

Là aussi, se trouvaient deux grandes compositions, une Vierge remettant le rosaire à Saint Dominique et une autre effigiant Saint Thomas d’Aquin, à genoux devant un autel, sur lequel un crucifix darde des lueurs ; et jamais, depuis le Moyen Age, l’on n’avait ainsi compris et peint des moines ; jamais l’on n’avait montré, sous l’écorce rigide des traits, une sève plus impétueuse d’âme. Borel était le peintre des Saints monastiques ; son art, d’habitude un peu lent, s’essorait dès qu’il les approchait et planait avec eux.

Mieux encore, peut-être, que dans le pensionnat des élèves d’Oullins, l’on pouvait, à Versailles, se rendre compte de la peinture si probe, si foncièrement religieuse de ce Borel.

A l’entrée de la chapelle des Augustines de cette ville, dont il avait décoré le vaisseau et le chœur, une Abbesse du XIVe siècle, Sainte Claire de Montefalcone, se découpait, debout, vêtue du noir costume des Augustines, sur les murs en pierre d’une cellule, entre un livre ouvert et une lampe de cuivre, placés derrière elle, sur une table.

Dans ce visage baissé sur le crucifix qu’elle porte à ses