Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/398

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administrateurs de l’œuvre ecclésiale, existait encore. Il y était dit que Jehan Soulas, Maître imagier, demeurant à Paris, au cimetière Saint-Jehan, paroisse de Saint-Jehan en Grève, s’engageait à exécuter en bonne pierre de la carrière de Tonnerre et mieux que les images qui sont autour du chœur de Notre-Dame de Paris, les quatre premiers groupes dont les sujets lui étaient et imposés et décrits ; le marché fait, moyennant le prix et somme de 280 livres tournois que les sieurs du chapitre de Chartres seront tenus de lui payer, au fur qu’il besognera.

Soulas, qui avait certainement appris son métier chez un artiste des Flandres, avait sculpté de petits tableaux de genre dont la franchise et l’entrain déridaient l’âme assombrie par la gravité des vitres ; elles semblaient, en effet, dans cet endroit, tamiser le jour au travers de cachemires de l’Inde, n’éclairaient que de scintillements obscurs et de lueurs fumeuses ce bas-côté.

Le deuxième groupe représentant Sainte Anne qui reçoit d’un ange qu’on ne voit point, l’ordre d’aller rejoindre Joachim à la Porte dorée, était une merveille d’observation exacte et de grâce ; la Sainte écoutait, attentive, debout, devant son prie-Dieu auprès duquel était étendu un petit chien ; et une servante levant la tête, de profil, et portant un pichet vide, souriait d’un air un peu entendu, en clignant de l’œil. Et tandis que, dans le tableau suivant, les époux s’embrassent, avec une trépidation de bons vieux balbutiant d’allégresse et s’étreignent avec des mains qui tremblent, la même servante, vue de face, cette fois, était si contente de leur joie qu’elle ne tenait plus en place, se dandinait, en pinçant