Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/402

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il s’ébahissait, une fois de plus, devant la flore incandescente de ses vitres ; et toujours il était et remué et repris par les cinq fenêtres en ogive, sous la rose, ces fenêtres dans lesquelles surgissaient autour de Sainte Anne la Maure, David et Salomon se dressant, rébarbatifs, dans une fournaise de pourpre, Melchissédech et Aaron, au teint calabrais, aux faces velues, aux yeux énormes et blancs, se détachant, patibulaires, dans des flots de jour.

La rosace rayonnant au-dessus d’eux, n’avait ni l’extraordinaire diamètre de celle de Notre-Dame de Paris, ni l’incomparable élégance de la rose en étoile d’Amiens ; elle était plus massive, plus petite, allumée de fleurs étincelantes poussées telles que des saxifrages de feu dans les trous du mur.

Et, en se retournant, Durtal regardait alors, sous la roue du transept Sud, les cinq grandes croisées qui faisaient vis-à-vis aux cinq du Nord ; et il retrouvait, brûlant comme des torchères de chaque côté de la Vierge sise juste en face de la Sainte Anne, les quatre Evangélistes portés sur les épaules des grands Prophètes : Saint Mathieu sur Isaïe ; Saint Luc sur Jérémie ; Saint Jean sur Ezéchiel, Saint Marc sur Daniel ; tous plus étranges les uns que les autres avec leurs prunelles semblables à des verres de jumelle, leurs cheveux en ruisselets, leurs barbes en racines arrachées d’arbre, sauf le Saint Jean que le Moyen Age latin portraiture toujours imberbe pour notifier sa virginité par ce signe ; mais le plus bizarre de ces géants était peut-être encore le Saint Luc qui, à cheval sur le dos de Jérémie, lui gratte doucement, ainsi qu’à un perroquet, le crâne, en levant des yeux dolents et pensifs au ciel.