Page:Huysmans - La Cathédrale, 1915.djvu/460

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sur une gueule renversée de dragon dont deux valets de Satan attisent, avec des soufflets, les flammes.

Et, dans ce coquemar, deux figures, symboles, l’une, de la médisance, l’autre, de la luxure, une figure de moine et une figure de femme, se tordent et pleurent, car d’énormes crapauds dévorent, au premier, la langue, sucent, à la seconde, le sein.

De l’autre côté du saint Michel, la scène change ; un ange souriant et joufflu charge sur les épaules d’un de ses compagnons et lutine un bambin qui brandit, joyeux, une branche ; puis, derrière lui, lentement s’avance une théorie de Saints, une femme, un roi, un cénobite, conduits par saint Pierre vers un porche précédant un édicule où le vieil Abraham, assis, tend sur ses genoux un tablier plein de petites têtes qui jubilent, d’âmes sauves.

Et Durtal constatait, en se remémorant la figure du saint Michel et de ces anges, qu’ils étaient les frères de la sainte Anne, du saint Joseph, de l’ange du portail Royal de Reims. C’était, en effet, le même modèle étrange, le même visage jeune et vieillot, au nez en cornet et au menton pointu, plus grassouillet cependant, moins anguleux peut-être qu’à Reims.

Cet air de famille, cette ressemblance permettaient de croire que les mêmes imagiers ou que leurs élèves avaient travaillé aux sculptures des deux cathédrales et pas à Chartres où aucun type analogue n’apparaissait, alors que pourtant certaines similitudes d’autres statues du porche Nord avec quelques uns des personnages, d’un autre genre, de la façade de Reims, étaient frappantes.

Toutes les suppositions sont possibles et aucune n’a