Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/130

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Céline persistait à partir la première ; elle devait toujours revenir dans un petit quart d’heure et elle rentrait à des heures indues qui affligeaient la concierge et lui faisaient perdre tout respect pour sa locataire. Désirée restait à la maison jusqu’à huit heures, puis elle dévalait à son tour par les escaliers, laissant la mère Teston buvotter son cassis, et elle courait rejoindre Auguste qui se promenait de long en large dans la rue du Cotentin.

Alors, ils commençaient de grandes excursions au travers du quartier, et presque toujours ils tombaient sur la chaussée du Maine et la redescendaient jusqu’à la rue de la Gaieté. Si cette rue mérite son nom, la chaussée du Maine est en revanche d’une tristesse lugubre. Il y fait noir comme dans un four et les boutiques sont closes dès huit heures. Çà et là, une pissotière dont la bouche est bouillonnée par la fleur du chlore chantonne doucement, éclairée par un bec de gaz, puis les réverbères s’espacent davantage, plantés entre des arbres ébouriffés et grêles, et, à dix pas de la rue, les flonflons arrivent, dans une bouffée de vent, et la clameur d’un faubourg en ribote monte de cette voie rutilante de lumières et reliant deux avenues noires.

Là, dès la brune, des globes s’allument et s’échelonnent à la hauteur des premiers étages, et