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Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/252

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bécile, faisait partie de cette lamentable cohue de gens qui contemplent les plafonds et, pour se donner une contenance, vérifient, toutes les dix minutes, l’attitude de leur cravate. Généralement il se réfugiait dans la salle des joueurs, où des hommes ignorant comme lui les délices des cartes et des danses, soupirent, regrettant leurs pantoufles et leur coin du feu, songeant qu’ils ne pourront plus appareiller un fiacre et devront traîner à leur bras, dans un quartier lointain, une femme agacée et lasse.

Il s’esquivait le plus tôt possible, rentrait et, quelque précaution qu’il prît, Céline se désendormait et l’interpellait avec rage.

— Tu sens la poudre de riz ! Tu m’en as fait, j’en suis sûre, — et elle clamait : — Va donc, va donc les retrouver tes filles du monde ! Ah oui ! Elles sont chouettes ! C’est rien que de le dire ! De jolies carcasses avec leurs airs godiches et les bassins qu’elles ont dans les épaules ! Faut voir ça, le matin, quand ça se réveille ! en v’là du joli taffetas ! ça tousse, ça geint, ça avale de l’huile de foie de morue, ça se loue de la santé à la petite semaine !

Et quand il essayait d’interrompre ce flot de grossièretés, elle déjectait, plus furieuse :

— Je sais ce que je dis, tiens, bougre de bête ! regarde-moi, il n’y a pas de toilettes, il n’y a pas