Page:Huysmans - Les Sœurs Vatard, Charpentier, 1880.djvu/52

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

lentes, sonner. — Ah ! C’était par trop embêtant que de vivre ainsi ! et les persécutions de sa chair la laissèrent sans force ; elle avait subitement des chaleurs dans les mains et aux tempes, l’œil se brouillait par instants, quand, à l’atelier, ces paroles qui évoquent l’image s’échangeaient entre les ouvrières, puis, à force d’observer ce vigile jeûne de l’amour, les névralgies lui rompirent le crâne ; en vain elle essaya de mouches d’opium sur le front, de perles de quinine, rien ne réussit à la soulager.

Ce fut à ce moment qu’elle rencontra Gabriel Michon qui tendit vers elle sa frimousse édentée d’arsouille et la lui fit embrasser sans répugnance. Elle reprit alors sa gaieté d’autrefois, rentrant à minuit, ne rentrant pas, s’attifant, le matin, dès le saut du lit, plantant une violette ou une rose dans son filet, se couvrant les épaules d’un fichu bariolé de rouge vif. Désirée riait à la voir se pommader avec tant de soin et se frotter les oreilles avec du savon. — Elle resta même, un jour, très émerveillée. — Céline avait acheté, dans un bazar de la rue Bonaparte, une petite fiole avec une fleur peinte sur le goulot. — Cela sentait le réséda suri. Céline s’en était saucé le chignon et les joues et ç’avait même été une révolution, dans l’atelier, que ce luxe de parfums. — Toutes les femmes en voulaient avoir, et l’un