VIII
n vit, il faut l’avouer, à Lourdes, dans
une température d’âme étonnante ; c’est
la chambre de chauffe de la piété. Ces
hurlements ininterrompus d’Ave, ces remous de
foule que l’on a constamment sous les yeux, cette
vue permanente de gens qui souffrent et de gens
qui se gaudissent et mangent et boivent sur l’herbe
comme un dimanche à Clamart, finissent par vous
abasourdir. On vit dans un milieu sans proportions ;
l’extrême des douleurs et l’extrême des joies, c’est
tout Lourdes. Au bout de quinze jours de ce régime,
on est à point ; l’on ne regimbe plus dans l’ambiance ;
on aide, soi-même, sans le savoir, à la développer
et le premier résultat de cet abandon de sa
personne est le désintérêt absolu de ce qui se passe
dans le reste de l’univers. Les peuples peuvent s’ex-