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Page:Huysmans - Les foules de Lourdes (1907).djvu/26

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LES FOULES DE LOURDES

Vers l’an 1500, à Monléon, au val de Garaison, dans un lieu jadis appelé « la Lande du Bouc, » parce qu’il servait de rendez-vous aux sorciers de la Gascogne, une petite bergère, Anglèse de Sagazan, gardait les troupeaux de son père, près d’une fontaine, quand une Dame, vêtue de blanc, lui apparut et après s’être fait connaître sous le nom de la Vierge Marie, demanda, tout comme à Lourdes, qu’on lui bâtit une chapelle et qu’on y défilât en procession.

La petite courut annoncer la nouvelle à son père. Lui, la crut sur parole, mais il n’en fut pas de même des habitants qui haussèrent les épaules et rirent. L’enfant retourna, le lendemain, à la fontaine et la Vierge lui apparut encore et réitéra sa requête, mais les recteurs et les consuls de Monléon, persuadés que le père et la fille qui leur débitaient de pareilles histoires étaient, l’un et l’autre, des déments, les congédièrent, en les engageant à se soigner.

Pour la troisième fois, Anglèse se rendit à la fontaine, mais elle y vint, accompagnée de sa famille et de quelques personnes du voisinage ; celles-ci ne virent point, ainsi qu’elle, la Vierge, mais toutes l’entendirent déclarer qu’Elle allait, pour les convaincre, changer le morceau de pain noir que la petite portait dans son bissac et aussi la provision restée dans la huche de la maison, en des miches de pain très blanc.