Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/266

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lesmes, « le Démon aime les violences, tout ce qui est poussé à l’outrance, même dans le Bien ».

Et c’est le chef-d’œuvre de son art que de détruire une vertu en l’exaltant !

Or, c’est ce qui advint à Lydwine ; elle n’avait pu se dépouiller de cette intempérance de tendresse qui lui avait déjà attiré, lors du décès de son frère, des remontrances. Depuis cette mort, sa dilection s’était accrue pour ses deux petits garde-malades, son neveu et sa nièce et le Seigneur la frappa, en plein cœur, en lui supprimant Pétronille ; cette jeune fille avait alors dix-sept ans et depuis qu’elle avait été blessée par les Picards, en voulant secourir sa tante, elle boitait et languissait, n’avait jamais pu parvenir, malgré les traitements des meilleurs médecins, à se rétablir.

Une nuit, Lydwine, ravie en esprit, aperçut une procession qui sortait de l’église de Schiedam ; en une lente théorie, cheminaient sur deux lignes, précédés des cierges et de la croix, les patriarches, les prophètes, les apôtres, les martyrs, les confesseurs, les vierges, les saintes femmes, les personnages du Commun des saints ; ils se dirigèrent du sanctuaire vers sa maison, y firent la levée d’un corps exposé à la porte et l’accompagnèrent à l’église.

Et, elle-même, se voyait derrière le convoi, avec trois couronnes ; une sur la tête, et une dans chaque main.

Et le rêve s’évanouit.

Lorsqu’elle eut repris ses sens, Lydwine pensa tout d’abord que cette vision la concernait et qu’elle était le présage de sa fin ; mais elle fut détrompée par