Page:Huysmans - Sainte Lydwine de Schiedam (1912).djvu/276

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là ; mais elle les blâma de juger des volontés de Dieu.

Bientôt, aux furies du haut-mal vinrent s’ajouter des crises de démence ; seulement elles furent très courtes ; elles sévirent juste assez pour qu’il fût dit, qu’excepté la lèpre, aucune maladie ne lui avait été épargnée ; elle fut encore terrassée par un coup d’apoplexie dont elle se releva, mais les névralgies et les rages de dents ne cessèrent plus ; un nouvel ulcère lui rongea le sein ; enfin depuis la fête de la Purification jusqu’à Pâques, la gravelle lui suscita des tourments terribles et elle eut de telles contractions de nerfs que ses membres déplacés se mêlèrent ; elle devint quelque chose de bizarre, d’informe d’où dégouttaient du sang et des larmes et d’où sortaient des cris.

Elle souffrait le plus impitoyable des martyres, mais elle embrassait maintenant, dans son ensemble, la tâche qu’elle était chargée d’accomplir.

Jésus lui exhibait, en une épouvantable vision, le panorama de son temps.

L’Europe lui apparaissait, convulsée — comme elle-même l’était, — sur le lit de son sol et elle cherchait à ramener, d’une main tremblante, sur elle, la couverture de ses mers pour cacher son corps qui se décomposait, qui n’était plus qu’un magma de chairs, qu’un limon d’humeurs, qu’une boue de sang ; car c’était une pourriture infernale qui lui crevait, à elle, les flancs ; c’était une frénésie de sacrilèges et de crimes qui la faisait hurler, ainsi qu’une bête qu’on assassine ; c’était la vermine de ses vices qui la dépeçait ; c’étaient