Page:Hypnérotomachie - éd. Martin - 1546.pdf/111

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coup plus long que le corps, tant que la liſiere venoit a fleur de terre, ou deux doigtz pres, & eſtoit encores ceincte audeſſoubz de l’eſtomach, pour ſerrer ce retrouſſement qui ſembloit enleué & bouffant a l’entour de ſon ventre & des flancs. Le reſte pẽdoit iuſques aux cheuilles des piedz, & alloit volletãt pour le mouuemẽt qu’elle faiſoit a cheminer : car il eſtoit batu d’vn petit vent qui l’eſbranſloit, le reiectant aucunesfois en arriere, pour faire veoir la belle forme & proportion de ſon corps, qu’elle n’eſtimoit pas beaucoup : qui me fit ſouſpecõner que ce n’eſtoit point choſe humaine. Elle auoit les bras longz, les mains grandes, les doigtz rondz & deliez, les ongles vermeils & luyſans : ce que lon pouoit facilement contempler autrauers de ſa chemiſe de toille claire & flocquãte a l’endroit ou les braz ioignent a l’eſpaule. Sa robbe eſtoit bordee d’vne frize de fil d’or traict, enrichie de pierrerie, & en ſemblable tout le tour de ſa mãte : a laquelle frize pendoient en maniere de frãge pluſieurs petitz fers d’or cõme de fleches barbelees. Le veſtemẽt eſtoit fendu aux deux coſtez des hanches, depuis le hault iuſques a bas, fermé a trois boutons, faictz chacun de ſix ꝑles d’vne groſſeur toute pareille, enfilees en ſoye azuree. Son col eſtoit lõguet & droit, reſſemblant Alabaſtre, & ſe monſtroit tout deſcouuert, pource que ſa robbe eſtoit eſchancree ſur la poictrine, et bordee de la meſme frize, entrãt entre les mammelles en maniere de cueur. Les mãches de ſa chemiſe eſtoient vn peu larges, lyees au poignetz, de deux braceletz d’or, boutõnez de deux groſſes perles oriẽtales. Mais ſur tout ie regarday ſes tetins, ſi rebelles, qu’ilz ne vouloient ſouffrir d’eſtre preſſez du veſtement, ains le repoulſoient en dehors, formant deux petites pommes, qui (a grand peine) euſſent peu emplir le creux de la main. Sa gorge eſtoit plus blanche que la neige, enuironnee d’vn collier plus riche que celuy pour lequel la deſloyalle Eryphilé enſeigna ſon mary Amphiaraus. c’eſtoit vne corde de groſſes pierres precieuſes meſlees de perles, en la maniere qui ſ’enſuyt. Contre le mylieu de la poictrine y auoit vn grand Rubiz enfilé entre deux groſſes perles, puis deux Saphirs, vn de chacun coſté, & deux autres perles. Apres deux Eſmerauldes, & deux perles, ſuyuies de deux Dyamans, & au mylieu vn autre Rubiz entre deux perles, de la forme & groſſeur d’vne Oliue, reſerué les perles qui eſtoient rondes, & un peu moindre. Elle auoit en ſa teſte vn chappelet de fleurs, par deſſoubz lequel ſortoit la cheuelure entortillee en facõ de petitz anneletz, faiſans vmbrage aux deux coſtez des tẽples. La groſſe flotte de perruque deſcẽdoit le lõg du collet, ou elle eſtoit trouſſee en bonne grace : & laiſſant les oreilles deſcouuertes, qui eſtoient rondes & petites, pendoit iuſques ſur les genoux, eſtincellant au Soleil comme filetz dor : car elle eſtoit plus belle & mieux diapree que la queue d’vn Pan quand il fait la roue. Elle auoit le front hault, large, & poly : puis au deſſoubz deux yeux rians, clairs comme les rayons du Soleil, compoſez de deux prunelles noires, enuirõnees d’vne blãcheur tele que ſi on euſt mis du laict a l’encõtre, il ſe feuſt mõſtré auſſi noir cõme encre. Ilz eſtoiẽt couuertz de deux ſourcilz deliez, & voultez en quarte partie de cercle, ſeparez et diſtãs l’vn de l’autre la largeur de deux bõs poulces, plus noirs que fin veloux. Les ioues eſtoiẽt vermeillettes, embellies de deux pettes fosses, aiãs coleur de roſes fraiches cueuillies a l'aube de iour, & miſes en vn vaiſſeau de Cryſtal. Certes ie les puis (a bon droict) comparer a celle tranſparence vermeille. Au demourant elle auoit