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LEUR CARACTÈRE.

Parmi les hommes d’origine berbère, on remarque aussi [Abou]-Mohammed-Ibn-Abi-Zeid [Yezîd], flambeau de la foi et membre de la tribu de Nefza[1].

Il y avait aussi chez eux des hommes versés dans la généalogie, l’histoire et les autres sciences, et dont l’un, Mouça-Ibn-Saleh-el-Ghomeri, personnage illustre de la tribu de Zenata, a laissé une grande réputation parmi les Berbères. Nous avons déjà parlé de lui dans notre notice sur les Ghomert, tribu zenatienne. Bien que nous n’ayons trouvé aucun renseignement certain sur les croyances religieuses d’Ibn-Saleh, nous pouvons, néanmoins, le regarder comme un des ornements de sa nation et une preuve que la sainteté, l’art de la divination, le savoir, la magie et les autres sciences particulières à l’espèce humaines existaient à son époque chez les Berbères.

Au nombre des récits qui ont couru parmi ce peuple est celui relatif à la sœur du célèbre chef Yala-Ibn-Mohammed-el-Ifréni. Selon les Berbères, cette femme donna le jour à un fils sans avoir eu commerce avec un homme. Ils l’appellent Kelman, et ils racontent de lui plusieurs traits de bravoure tellement extraordinaires que l’on est obligé de regarder ce haut courage comme un don que Dieu lui avait fait à l’exclusion de tout autre individu. Il est vrai que la plupart des chefs, parmi eux, nient l’existence de ce phénomène ; méconnaissant ainsi la faculté que la puissance divine peut exercer afin de produire des choses surnaturelles. On raconte que cette femme devint grosse après s’être baignée dans une source d’eau chaude où les bêtes féroces avaient l’habitude d’aller boire en l’absence des hommes. Elle conçut par l’effet de la bave qu’un de ces animaux y avait laissé échapper après s’être abreuvé, et l’on nomma l’enfant Ibn-el-Aced (fils du lion) aussitôt qu’il commença à manifester son naturel courageux. Les Berbères racontent un si grand nombre d’histoires semblables que si l’on se donnait la peine de les mettre par écrit, on remplirait des volumes.

Telles furent les habitudes et le caractère des Berbères jusqu’à

  1. Voy. note, page 28 de ce volume.