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Page:Ibn Khaldoun - Histoire des Berbères, trad. Slane, tome 1.djvu/544

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APPENDICE.

boire du vin. Parmi les partisans de Mohammed, un certain nombre se tenait prêt à s’emparer du château d’eau (Casr-el-Ma) et de l’hôtel du gouvernement, aussitôt qu’ils entendraient battre les tambours et verraient briller un flambeau du haut du kiosque. Ce jour-là, Ahmed resta au bain plus long-temps que d’ordinaire ; vers l’après-midi, Othmân-Ibn-er-Rebiâ vint l’y trouver et lui apprit que son frère devait l’attaquer cette nuit et qu’il tenait des hommes dans le château d’eau, tous prêts à le seconder. Ahmed considéra cette nouvelle comme fausse ; néanmoins il envoya une troupe de cavalerie pour reconnaître cet endroit, mais personne n’y avait paru, parce que le coup ne devait se frapper qu’au coucher de soleil. Cette circonstance contribua à le confirmer dans son incrédulité et à le rendre parfaitement indifférent à tous les bruits alarmants qui lui arrivaient. Quand approcha l’heure de la prière du soir, Mohammed envoya un de ses esclaves auprès des soldats auxquels son frère avait confié la garde de sa porte, pour leur dire que son maître avait l’intention de leur donner un témoignage honorable de sa bienveillance, et que d’abord, il allait leur faire apporter à boire et à manger. Ils se rassemblèrent autour du festin, et quand le prince jugea que le vin avait commencé à opérer, il leur envoya de nouveau son esclave demander leurs épées afin d’y attacher de riches ornements. Tous s’empressèrent de livrer leurs armes. Au coucher du soleil, on ferma les portes du palais, et une troupe d’hommes commandés par Amer-Ibn-Amroun-el-Corechi se précipita sur les soldats et les passa tous au fil de l’épée. On fit alors battre le tambour ; le flambeau brilla sur le kiosque ; les amis de Mohammed accoururent de tous côtés, et Ahmed-Ibn-Sofyan commença à massacrer les personnes qu’il croyait être partisans d’Ahmed. Pendant toute la nuit, les deux partis continuèrent à se battre, mais l’arrivée d’une foule d’habitants de Cairouan qu’Ahmed-Ibn-Sofyan avait appelés à son secours, décida la défaite des troupes de l’usurpateur. Les fuyards, vivement poursuivis, succombèrent sous les coups de leurs adversaires, et Ahmed [l’aghlebide] se hâta de gagner son palais où il retenait prisonnier un frère d’Ahmed-Ibn-Sofyan, appelé Khafadja.