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Page:Ibn Khaldoun - Histoire des Berbères, trad. Slane, tome 1.djvu/569

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EN-NOWEIRI.

saient les portes, on enleva les divans de parade et on emporta tout le mobilier. Au bout de six jours, la cavalerie du Chîite parut aux environs de la ville, et l’aspect seul de ces troupes mit fin à l’œuvre de dévastation.

Un grand nombre d’officiers, d’esclaves et de chefs de bureaux qui n’avaient pas accompagné Zîadet-Allah se dispersa dans les autres villes de l’empire.

Quand Ibrahîm-Ibn-Abi-’l-Aghleb arriva à Cairouan et apprit le départ du prince, les soldats qui l’avaient rejoint s’en allèrent chacun chez soi. Abandonné de ses hommes, Ibrahîm entre au palais, du gouvernement et fit proclamer une amnistie générale. L’ordre étant ainsi rétablie, les jurisconsultes, les notables de la ville, et une foule immense se rassembla à la porte du palais et le nommèrent souverain. Il leur représenta alors que la mauvaise conduite de Zîadet-Allah avait perdu l’état, encouragé ennemi et l’avait même établi au cœur du royaume ; il parla ensuite du Chîite et des Ketema, les dépeignant comme coupables des forfaits les plus horribles, et il finit par demander leur concours et appui : « Mon seul désir, dit-il, est de protéger vos familles, vos personnes et vos biens ; aidez-moi avec dévouement à accomplir cette tâche ; mettez à ma disposition des hommes et de l’argent afin que je puisse défendre l’honneur de vos femmes et vous sauver vous-mêmes d’une mort certaine. » À cette adresse ils répondirent : « Notre dévouement est acquis à vous ou à tout autre qui nous gouvernera ; mais, quant à l’argent, nous n’en avons pas de quoi vous satisfaire, et pour combattre, nous n’avons ni les moyens ni l’habitude. D’ailleurs, vous vous êtes déjà mesuré avec l’ennemi ; vous aviez autour de vous des guerriers intrépides et des chefs puissants ; le trésor public était à votre disposition, et cependant, vous n’avez pas réussi ; comment donc espérer triompher par notre secours ? Nous voulons garder notre argent pour racheter nos vies. » Leur ayant adressé encore la parole et ayant reçut la même réponse : « Eh bien ! dit-il, voyez quelles sommes se trouvent entre vos mains à titre de dépôts et consignations, et prêtez-moi cet argent ; je ferai alors annoncer que je vais distribuer des arrhes, et je pourrai ainsi rassembler