madame alving le regarde en silence.
le pasteur, arpentant la scène. — Enfant prodigue, a-t-il dit ; hélas, oui ! hélas, oui !
madame alving continue à le regarder.
le pasteur. — Et vous-même, que dites-vous de tout cela ?
madame alving. — Je dis qu’Oswald a raison d’un bout à l’autre.
le pasteur, avec un soubresaut. — Raison ! raison d’émettre de tels principes ?
madame alving. — Ici, dans ma solitude, je suis arrivée à penser comme lui, monsieur le pasteur. Mais je n’ai jamais osé toucher la question de trop près. Soit ! mon fils parlera pour moi.
le pasteur. — Vous êtes bien à plaindre, madame Alving. Écoutez-moi, nous allons causer sérieusement. En cet instant, vous n’avez plus devant vous votre homme d’affaires, votre conseiller, votre ami de jeunesse et celui de votre défunt mari ; c’est le prêtre qui est là et qui vous parle comme il le faisait à l’heure du plus grand égarement de votre vie.
madame alving. — Et qu’a-t-il à me dire, le prêtre ?
le pasteur. — Je veux d’abord remuer vos souvenirs, madame. Le moment est bien choisi : demain est le dixième anniversaire de la mort de votre mari. Demain, le voile tombera du monument qui doit honorer sa mémoire. Demain, je m’adres-