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LES SOUTIENS DE LA SOCIÉTÉ

LONA. — Oh ! non, jamais, mon enfant !

MARTHA. — Ton seul devoir ce sera de le suivre, car tu seras sa femme.

JOHANN. — Oui, oui !

LONA. — Hein ? Tiens, il faut que je t’embrasse, Martha ! je n’aurais pas espéré cela de toi.

MARTHA. — Moi même je ne le prévoyais pas. Il fallait briser la glace. Comme nous avons souffert ici de leurs habitudes, de leurs manières. Révolte-toi, Dina ! Épouse-le. Il surviendra quelque événement qui les éclaboussera tous.

JOHANN. — Dina, que répondez-vous ?

DINA. — Je serai votre femme.

JOHANN. — Dina !

DINA. — Mais je veux d’abord travailler, devenir quelqu’un… Etre une chose que l’on prend… non, cela ne me conviendrait pas.

LONA. — Oui, c’est très bien, c’est bien.

JOHANN. — L’espérance me soutiendra dans l’attente ; et je compte…

LONA. — La conquérir, John ! Maintenant, à bord !

JOHANN. — A bord ! Oh ! Lona, chère sœur, un mot, écoute ! (Il l’emmène au fond de la scène et lui parle rapidement.)

MARTHA. — Dina, heureuse enfant ! Laisse-moi te regarder une dernière fois, une dernière fois t’embrasser !

DINA. — Mais ce n’est pas la dernière fois ! Ma chère, ma bien-aimée tante, nous nous reverrons !

MARTHA. — Jamais ! Promets-moi, Dina, de ne jamais revenir. (Elle lui prend les deux mains et la regarde en face.) Va où ton bonheur t’appelle, chère enfant, sur