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Page:Ibsen - Madame Inger à Ostraat, trad. Colleville et Zepelin.djvu/125

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À OSTRAAT

à Ostraat, dans les rêves et la poésie. Voilà pourquoi, vous me comprendrez ; sachez donc que jadis, moi aussi, j’ai vécu une existence semblable à la vôtre. Je m’imaginais, quand j’entrerais dans la vie, dans le grand monde, que je rencontrerais une femme superbe et fière, femme qui m’indiquerait un grand et noble but.

Je me suis trompé, Eline Gyldenlöve !

Les femmes venaient à ma rencontre, mais aucune ne fut celle-là ! Avant même d’être homme, j’avais appris à lies mépriser toutes. Est-ce ma faute ? Pourquoi les autres n’étaient-elles pas comme vous.

Je sais que le sort de votre pays vous tourmente cruellement, vous savez aussi ma responsabilité dans ce malheur.

On dit que je suis trompeur comme l’écume de la vague. Peut-être, mais s’il en est ainsi, c’est aux femmes que je le dois.

Si, plus tôt, j’avais trouvé ce que je cherchais et si j’avais trouvé une femme fière, noble, hautaine comme vous l’êtes ; certes, ma vie aurait été toute autre. Peut-être me serais-je trouvé à côté de vous pour défendre les opprimés de La Norwège, car j’ai la certitude que rien au monde n’est plus puissant qu’une femme quand sa main sait montrer à un homme la route que Dieu a marquée.

eline
(Moitié parlant à elle-même).

Serait-ce vrai ?

Non, non ! Le mensonge est dans son regard, la trahison sur ses lèvres.

Et cependant aucune musique n’est douce comme sa parole.