pourtant c’est vrai ! Coquins d’amis ! Écoute-moi, Seigneur ! Tu es la sagesse, la justice même ! J’en appelle à toi ! (Tendant les bras au ciel.) C’est moi, Peer Gynt ! Regarde-moi, Seigneur ! Père, prends-moi sous ton aile, ou je périrai ! Fais couler la machine, fais affaler le yacht ! Arrête les voleurs. Embrouille le gréement. Écoute-moi ! suspends toutes les autres affaires ! Le monde marchera bien tout seul un moment !… Dieu de Dieu ! Il ne m’entend pas ! Sourd comme toujours ! C’est raide, ça ! Un Dieu à bout de ressources ! (Faisant un signe vers le ciel.) Psst ! J’ai lâché le plantage, le commerce des noirs, j’ai envoyé des missionnaires en Chine ! Service pour service ! Viens à mon aide !
(Un jet de flamme jaillit de la cheminée du yacht ; une épaisse fumée l’enveloppe ; on entend une sourde détonation. Peer Gynt pousse un cri et s’affaisse sur le sable. Au bout d’un instant, la fumée se dissipe. Le yacht a disparu.)
Le châtiment ! Tout a sombré ! Plus un chat ! Béni soit le coup du sort ! (Ému.) Un coup du sort ? Non. C’est plus que cela. Ils périssent et je suis sauvé. Ô grâces te soient rendues de m’avoir protégé, d’avoir tenu pour moi en dépit de mes torts. (Il respire profondément.) Quel bien cela fait et quelle consolation de se sentir en sûreté, objet d’une protection spéciale. Mais je suis au désert ! Où trouver à manger et à boire ? Bah ! je découvrirai